sábado, enero 25, 2014

25.01.99, 13h19

Instalación, 2m x 2m
Papel
2013



El 25 de enero de 1999 un terremoto de 6,4 grados en la escala de Richter sacudió nuestras vidas. Hoy, 15 años después, nosotros, quienes perdimos seres queridos y sobrevivimos a las 13h19, recordamos con un nudo en la garganta ese momento.

Papá: la primera vez que uno oye la palabra Terremoto es de mucho impacto.
Mamá: ay sí, porque siempre ha sido Temblor.
Papá: porque si tembló entonces uno dice “¡uy, que temblor tan fuerte!”, y cuando oye la noticia “Terremoto en Armenia” entonces ahí uno aterriza y dice “¡es que esto fue un terremoto!”.
Yo: porque uno no dimensiona, yo creo que nosotros dentro del apartamento no sabíamos que eso era de esa magnitud. Cuando bajamos al parqueadero, que todas las personas estaban ahí, bueno ahí uno dice “uy sí, fue como fuerte…” y luego uno sale del  condominio y todavía es más fuerte. Pero uno no sabe que está así por todas partes, uno nunca alcanza a dimensionar.
Mamá: cuando ve las paredes en el suelo, ¿cierto?, las paredes de los primeros apartamentos de La Aldea, todas se vinieron así, todos quedaron… las camas ahí volando, la sala… eso también fue muy impactante, ver los primeros pisos ahí…
Papá: y a mí me decían “se cayó tal edificio” y yo decía “tan exagerados, qué se va a caer un edificio”, no creía. Y cuando fui a caminar y vi los edificios aterrizados en 5metros y uy sí… (silencio) ahí sí creí.
Mamá: cuando empezó a temblar, como uno no sabía que eso iba a ser así, yo me paré y fui hasta la puerta, como para abrirla. En ese momento vi cuando el vidrio del bife, que estaba ahí contra la pared, se fue saliendo, el vidrio se fue saliendo así… entonces las cosas que estaban encima unas quedaron aquí y las otras quedaron allá.
Hermana: Yo me acuerdo de eso.
Yo: Dani, ¿usted no se acuerda que las dos estábamos en la pieza?, porque creo que en esa época teníamos las dos camas en la misma pieza y estábamos sin medias. Yo me acuerdo de eso porque nos habíamos acabado de bañar, y cuando el terremoto empezó mi mamá salió corriendo y yo no era  capaz de caminar porque el piso se movía mucho, entonces usted tampoco era capaz de caminar porque, imagínese, usted era más chiquita que yo, como íbamos a caminar en esa cosa tan horrible… entonces lo único que yo hice fue abrazarla, y  nos quedamos ahí porque no podíamos hacer nada más, no podíamos movernos.
Dani: yo no sé por qué no me acuerdo cuando… cuando se movía, yo tengo como imágenes, como fotos. Pero cuando se movía no, me acuerdo como de cosas muy detalladas  
Mamá: su papá se quedó con ustedes, abrazándolas, y yo miré para atrás y nos hicimos señas de que…pues…como que ya. Pero cuando yo estaba ahí, sí, yo pensé que ya, yo no esperaba sino que eso se desfondara, porque el tanque de arriba del agua, empezó a salirse el agua para acá y para allá, para acá y para allá…entonces se salía por los dos lados el agua y cuando de repente empezaron a agrietarse las paredes de las escalas, cierto, y empezaron a salirse como los tubos esos de PVC, que quedan verdes ahí, los tubitos que conducen la energía, las cuerdas, ¿no?, por la pared, empezó eso a reventarse entonces salía hasta agua por ahí…entonces yo sí dije…y cuando miré para la entrada de La Aldea se vino ese barranco, fuera de todo, entonces sí pensé que …ya.
Papá: Yo no vi nada, yo solamente miraba la pared que estaba al frente a ver cuándo se me iba a venir encima. Y no me di cuenta del bife, ni de que se salieron las cosas, ni de nada.
Mamá: ¿verdad?
Papá: Sí, a eso le llaman, creo que es, Visión de Túnel, que las personas no… descarta todo y solamente deja lo que es importante para sobrevivir. O sea, se va a venir una pared, y todo lo que importa es quitársele a la pared cuando se venga.
Mamá: además fue muy largo y los más horrible es que entre más rato eso arreciaba tan horrible… eso se llenó de polvo por todas partes porque como  los edificios se desfondaron y esos barrancos se cayeron entonces todo quedó como amarillo. Fuera de todo, semejante ruido y semejante cosa, eso todo quedó amarillo, esa nube de polvo en el centro, ay no… qué pánico volver a vivir algo así, no…
Papá: yo en ese momento quedé como bloqueado, sin saber qué hacer. Me decían “vecino, ¿usted qué va a hacer, va a ir a donde su suegro o va a dormir en el apartamento?”, y yo era como callado ahí. Hasta que él me dijo “¿no sabe qué hacer?” y yo le dije “sí, no sé”, como era una situación tan diferente que nunca he vivido, queda uno bloqueado.
Laura: lo que vino después fue lo peor…

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Fr.

Le 25 Janvier 1999 un tremblement de terre de 6,4 sur l’échelle de Richter secouait nos vies à 13h19. Aujourd’hui, 15 ans plus tard, nous, qui avons perdu des êtres aimés et avons survécu, nous nous rappelons de ce moment avec un nœud dans la gorge.

Mon Père: la première fois que l'on entend les mots tremblement de terre ça a  beaucoup d'impact.
Ma Mère: Oh oui, car on a toujours dit séisme.
Mon Père: Parce que si il y a un séisme alors vous dites "le séisme a été si fort !, " et quand on entend le mot « Tremblement de terre à Arménia », alors on réalise et on se dit " en fait c'était un tremblement de terre ! ".
Moi: Parce qu’on ne connaît pas la dimension du problème, je crois que quand nous étions à l'appartement, nous ne savions pas que c’était de cette ampleur, et pourtant, quand nous sommes arrivés au parking, tous les gens étaient là, à ce moment on se dit " ah oui, c'était aussi fort ... " et après on sort de la résidence et on comprend que c’est encore plus important. Mais on ne sait pas que c’est le cas partout, alors on n'arrive pas à mesurer ce qui se passe.
Ma Mère: Quand on voit les murs par terre, n’est ce pas? Les murs des premiers appartements de  La Aldéa, ils sont tous tombés, et tous étaient ... on voyait les lits de l’extérieur, le salon… C'était aussi très impressionnant, voir les premiers étages comme ça ...
Mon Père: Et moi on m'a dit " ce bâtiment est tombé " et je disais " tu exagères trop, il ne peut pas tomber ce bâtiment", je ne croyais pas. Et quand je suis allé faire un tour et que j'ai vu sur 5 mètres des bâtiments par terre ... (Silence) alors oui, j’y ai cru.
Ma Mère : Quand le tremblement a commencé on ne s’attendait pas a une chose pareille, je me suis mise debout et je suis allée jusqu’à la porte de l’entrée, je voulais essayer de l’ouvrir mais quand j’ai vue l’horreur de la situation… J’étais coincée  sous l’encadrure de la porte, je ne pouvais plus bouger, je me suis aperçue que l’eau sortait des mûrs   et que le four était tombé dans la cuisine. J’ai vue la vitre sur le buffet qui était contre le mur, je l’ai vue s’avancer vers l’extérieur alors toutes les choses qui avait dessus ont commencé à tomber, elles étaient toutes éparpillés.
Ma Sœur : Je me rappelle de ça.
Moi : Tu ne te rappelles pas quand on était dans la chambre ?, je crois qu’à cette époque on avait les deux lits dans la même chambre. On n’avait pas de chaussettes, je me rappelle de ça parce qu’on venait tout juste de prendre une douche. Et quand le tremblement a commencé ma mère est partie en courant et moi je ne pouvait pas marcher parce que le sol bougeait trop fort, alors toi tu ne pouvais pas marcher non plus, tu étais plus petite que moi, ce n’était pas possible, comment on allait marcher dans un truc pareil?... alors la seule chose que j’ai faite c’est que je t’ai prise dans mes bras, c’est tout… et on est restée là parce qu’on ne pouvait rien faire d’autre, on ne pouvait pas bouger.
Ma Sœur : je ne sais pas pourquoi j’ai que des images, comme des photos. Je ne me rappelle pas du mouvement, juste de petits détails.
Ma Mère : votre père est resté avec vous, en vous serrant dans les bras, et c’est là que j’ai regardée derrière, là où vous étiez, et on s’est fait le signe de…bon… que c’était la fin. Quand j’étais là j’étais convaincue que c’était fini, j’attendais juste que le sol s’effondre, parce que le réservoir d’eau du bâtiment était au dessus de notre appartement, et comme tout bougeait très fort, l’eau a commencée à sortir par-ci par-là, par-ci par-là… alors il y avait de l’eau partout, et d’un coup les murs des escaliers ont commencé a se fissurer, les tuyaux de PVC, ceux qui sont verts, les tuyaux qui conduisent l’électricité et les fils électriques sont sorties d’entre les mûrs. Ils ont commencé à s’éclater, alors l’eau sortait par là, moi, je me suis dis que… et quand j’ai regardée l’entrée de la résidence, La Aldéa, j’ai vu le flanc de la montagne s’effondrer, alors je pensais que… voilà.
Mon Père : Je n'ai rien vu, j'ai juste regardé le mur qui était en face pour savoir quand est-ce qu’il allait tomber sur moi. Et je n’ai pas remarqué le buffet, ni tout ce qui arrivait, ni quoi que ce soit.
Ma Mère : C’est vrai ?
Mon Père : Oui, on appelle ça, je crois que c'est, vision du tunnel, quand les gens ne ... c’est quand on écarte tout et on ne laisse que ce qui est important pour la survie. Autrement dit, s’il y a un mur qui va tomber,  tout ce qui importe est d’éviter qu’il tombe sur nous.
Ma Mère : Et vous savez ce qu’on n’oublie jamais ? C’est le son, le son qui sort de la terre.
Ma Sœur : Ah oui ... Je me souviens du son.
Ma Mère: J’étais très impressionnée parce qu’il y avait beaucoup de poussière autour du Parc Uribe, il y en avait beaucoup, tout était recouvert d’une couleur jaunâtre, de la poudre de terre jaune. Le mûr était tombé en premier, le flanc de montagne de l’entrée de La Aldéa, alors qu’il était immense, il s’est effondré, et après le bâtiment qui est tombé, le bâtiment qui a tué plein de personnes… c’est pour ça qu’il y avait autant de poussière dans l’air, à cause des édifices qui se sont effondrés. Et le bruit que ça fait…c’était comme un écho, très bizarre, une chose étrange au fond... et comme les choses commencent à tomber, les verres à s’éclater, les choses à se casser, alors c'est un son mélangé de tout ça... ah non, c’est un son très horrible. Le bruit de la terre est très horrible.
Mon Père : Moi, à ce moment, j’étais bloqué, je ne savais pas quoi faire. On me disait « et qu’est-ce que vous allez faire, vous allez dormir chez quelqu’un ou vous restez dormir à l’appartement ? », et moi, je restais en silence jusqu’au moment où mon voisin m’a dit « vous ne savez pas quoi faire ? » et je lui ai répondu « oui, je ne sais pas ». Comme c’était une situation tellement différente que je n’avais jamais vécu, j’étais bloqué.
Moi : Et ce qui est arrivé après c’était le pire...

martes, enero 14, 2014

Vida de espera.

"...Que los que matan se mueran de miedo.

¡Y que dejen de matar de una puta vez!".

 Joaquín Sabina.









Todos los días pienso que me podrían matar.
Todos los días, pienso, me podrían matar.
Todos los días me podrían matar.
Todos los días me pueden matar.
Todos los días me matan.


Pienso, todos los días, que me podrían matar.
Pienso que me pueden matar, todos los días.
Pienso, día tras día, que me podrían matar.
Pienso, cada día, que me podrían matar.


Cada día me podrían matar, pienso.
Cada día, pienso, me podrían matar.
Cada día pueden matarme.
Cada día me matan.


Recuerdo, cada día, mi muerte.
Recuerdo, día a día, que me podrían matar.
Recuerdo, día tras día, que me pueden matar.
Recuerdo, mi muerte, todos los días.
Recuerdo que matan.


Temo, todos los días, que me podrían matar.
Temo, día tras día, que me maten.
Temo, día tras día, mi muerte.
Temo, día a día, que me puedan matar.
Temo, cada día, que me puedan matar.
Temo, mi muerte, día tras día.
Temo, que un día, me maten
Temo, entre día y día, que me maten.
Temo, que uno de estos días, me maten.
Temo todos los días.
Temo que me maten.
                                         

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Fr.                  

Homenaje a los desaparecidos
Tierra, látex, hilo, pigmentos, velas.
200cm x 30cm.
2014
Vie d'attente.                                                                                                                          

Tous les jours je pense qu’on pourrait me tuer.
Tous les jours, je pense, on pourrait me tuer.
Tous les jours on pourrait  me tuer.
Tous les jours on peut me tuer.
Tous les jours me tuent.

Je pense, tous les jours, qu’on pourrait me tuer.
Je pense qu’on peut me tuer, tous les jours.
Je pense, jour après jour, qu’on pourrait me tuer.
Je pense, chaque jour, qu’on pourrait me tuer.

Chaque jour on pourrait me tuer, je pense.
Chaque jour, je pense, on pourrait me tuer.
Chaque jour on peut me tuer.
Chaque jour on me tue.

Je me rappelle, chaque jour, de ma mort.
Je me rappelle, au jour le jour,  qu’on pourrait me tuer.
Je me rappelle, jour après jour, qu’on peut me tuer.
Je me rappelle, de ma mort, tous les jours.

Je crains, tous les jours, qu’on pourrait me tuer.
Je crains, jour après jour, qu’on me tue.
Je crains, jour après jour, ma mort.
Je crains, au jour le jour, qu’on puisse me tuer.
Je crains, chaque jour, qu’on puisse me tuer.
Je crains, ma mort, jour après jour.
Je crains qu’on me tue.
Je crains, qu’un jour, on me tue.
Je crains, de jour en jour, qu’on me tue.
Je crains, qu’un de ces jours, on me tue.
Je crains tous les jours.

jueves, enero 02, 2014

Bailando sin bailar.

Serie: Te extraño
Tela, hilo, arroz
2011


Para celebrar el año nuevo, Celia Cruz hizo mover la cadera de un par de amigos franceses. De vez en cuando me permito importar un pedazo de sol de América Latina, en las primeras horas del 1 de Enero tenía que poner salsa. En un ambiente festivo, quince personas en mi sala y sin el corcho que salió volando por la ventana, me propuse lo que en dos años no he podido hacer: bailar salsa con un francés. Sin muchos voluntarios y con el volumen resonando en todo el edificio, se me salió el bailao, me puse de pie, miré alrededor, escogí a un invitado y le mostré lo primero que hay que hacer para empezar el ritual: poner la mano derecha en la cintura de la dama y  tomar su otra mano con la izquierda a la altura de los hombros. De fondo: La vida es un carnaval, ¡qué ganas de bailar!, ¡qué cantidad de meses sin chucu-chucu!, ¡qué alegría produce gritar Azúcar!, ¡qué maravilloso sería lograr compartir eso con mis amigos que me han compartido tanto de su cultura!


Una vez la posición adoptada, escogí el paso básico para bailar: pierna derecha al lado derecho, pierna derecha al centro, pierna izquierda al lado izquierdo,  pierna izquierda al centro. Con un poco de swing, unos coctelitos bien hechos y un poco de paciencia, uno puede bailar hasta varias canciones repitiendo ese movimiento, es más, uno puede no cambiar de pareja durante media hora y terminar conociendo su vida entera. Así me pasaba cuando era adolescente, con mi mejor amiga íbamos a fiestas de amigos, de conocidos, de amigos de amigos, del colegio, del barrio y hasta de desconocidos en la famosa calle de la ciudad en donde los bares y las discotecas abrían hasta las 3 de la mañana. El hombre escoge, la mujer acepta o no (nosotras siempre aceptábamos);  el hombre propone las vueltas y los cambios de paso, la mujer lo sigue con astucia evitando pisarle los zapatos; el hombre mira a la mujer  directo a los ojos, la mujer empieza una conversación (o viceversa); el hombre y la mujer bailan  el tiempo que las piernas aguanten si hay química en los cuerpos y en la conversación. Así aprendí a bailar salsa, creo que así aprenden la mayoría de personas,   – ¿Pero también es un baile para coquetear, no?  - Si así lo decides, sí. También puede ser un baile para divertirse sin otras intensiones. –Entiendo.  – Un, dos, tres, un, dos, tres, no mires los pies, diviértete.  Pasamos a La negra tiene tumbao, incorporé una vuelta básica a nuestro pequeño repertorio de pasos de salsa: el famoso Ocho, -ça s’appel le Ocho, comme le huit, le decía presentándole lo que parecía una acrobacia. Siempre jugando el curioso reto de traducir lo intraducible. La mano derecha a la altura de la cintura, abierta sobre la espalda, para empezar la vuelta; cuando la mujer ve que el hombre pone la mano ahí entonces entiende que tiene que poner la mano sobre la suya para hacer El Ocho, es implícito, pon la mano. –Oh là là!  –Ves, se llama Ocho porque haces dos vueltas como la forma del número 8. – ¡Otra vez! –Dobla el brazo, para que no te duela.  – ¿Así?  – ¡Exacto!, ahora más rápido   – ¡Genial!   – Ahora cuando terminemos el Ocho, me acercas con los brazos y seguimos haciendo el primer paso que te mostré.  Y pasamos a Que le den candela, lo estaba logrando, ¡bailar salsa de nuevo!, mi amigo parecía interesado, motivado y feliz, qué mejor manera de empezar el año que bailando. – ¿Sabes que en Francia tomar la mano de alguien es algo muy simbólico? –-¿Ah sí?  –Cuando le tomas la mano a alguien es porque es tu pareja o porque estás coqueteando y la persona se muestra interesada. –Veo, ¿aunque sea en un contexto diferente?  –En el contexto en el que estamos, una fiesta, puede no significar eso si de antemano se sabe que me estás enseñando a bailar, pero si no se aclara entonces la persona puede pensar que le estás coqueteando, ¡el contexto es súper importante!   – ¡Y eso que no te he mostrado los otros pasos!  –Y cuando le pones una mano en la cadera a alguien quiere decir que estableces un contacto físico con esa persona, que están más cerca y los dos aceptan. –En Colombia cuando bailas salsa con alguien puedes aprovechar para coquetear también, pero aunque haya mucho más contacto físico que en la cultura francesa no significa lo mismo; si para bailar hay que poner una pierna entre las piernas del otro no siempre quiere decir que estás pensando en invitar a tu pareja a tomar un café y conocerla mejor. – Aquí nunca es la mujer quien busca al hombre para proponerle salir a bailar, es el hombre casi siempre, si un día estás en una fiesta y sacas a bailar a un tipo que no conoces tal vez tu chico no se ponga muy contento. –Entiendo, bueno… ¡tú me conoces bien, sigamos bailando!. “Yo tengo un corazón de rumba que huele a calles de Cuba, tabaco, café, y chango”, esta mujer es increíble. No es que los europeos no sepan bailar, como dicen en la tierra de la salsa, es que los códigos son diferentes, las personas se tocan menos y la guachafita pasa primero por la palabra que por los gestos. Ese amanecer no pude bailar más de tres canciones pero una vez más esta cultura me sorprendió, lo que empezó como un curso exprés de salsa terminó en reflexión sobre las diferencias del contacto humano según el país en el que me encuentro. Son espejos que se paran frente a mí y me devuelven la imagen de la persona que soy: cuyabra, quindiana, colombiana, latina, extranjera. Y entonces uno se va construyendo, pegando los retazos, compartiendo tradiciones, deshaciendo costumbres, mezclando acentos, inventando palabras, cambiando pavo por fois gras, aprendiendo de todos, escuchando sin brindis, bailando sin bailar.

____________________________
Fr.

En dansant sans danser

Pour fêter la nouvelle année, Celia Cruz a fait bouger les hanches de quelques amis français. De temps en temps je me permets d’importer un morceau de soleil d’Amérique Latine.  Dans les premières heures du 1 Janvier, il fallait que je mette de la salsa. Dans une ambiance festive, une quinzaine de personnes dans mon salon où les bouchons s’envolent par la fenêtre, je me suis proposé de faire ce qu’en deux ans je n’ai pas pu faire : danser la salsa avec un français.  Il n’y avait pas beaucoup de volontaires et le son résonnait dans tout le bâtiment,  mon côté latin est ressorti, je me suis mise débout, j’ai regardée autour de moi, j’ai choisi un invité et je lui ai montré la première chose qu’il faut savoir pour commencer le rituel: mettre la main droite sur la taille de la dame et prendre son autre main avec la main gauche à hauteur des épaules. Au fond: La vida es un carnaval, quelle envie de danser!, quelle quantité de mois sans ce rythme!, quel bonheur me produit de chanter Azúcar !, quelle merveille pourra-être celle de partager cette danse avec mes amis qui m’ont partagé autant de leur culture!

Une fois la position adoptée, j’ai choisi le pas basique pour danser : la jambe droite vers le côté droit, la jambe droite au centre, la jambe gauche vers le côté gauche, la jambe gauche au centre. Avec un peu de swing, quelques petits cocktails bien préparés et un peu de patience, on peut danser plusieurs chansons en répétant ce mouvement, on peut même ne pas changer de partenaire pendant une demi-heure et finir par connaitre  toute sa vie. C’était le cas quand j’étais adolescente, avec ma meilleur amie on allait aux soirées des amis, des connaissances, des amis des amis, de l’école, du quartier et même des inconnus sur la fameuse rue de la ville où les bars et les discothèques fermaient à 3h du matin. L’homme choisi, la femme accepte ou pas (nous acceptions toujours) ; l’homme propose les tours et les changements des pas, la femme le suit astucieusement pour éviter de marcher sur ses chaussures ; l’homme regarde la femme dans les yeux, la femme entame une conversation (ou vice-versa) ; l’homme et la femme dansent le temps que ses jambes tiennent s’il y a une bonne chimique entre les corps et la conversation. C’est comme ça que j’ai appris à danser la salsa, je crois que la plupart de gens apprennent comme ça. –Mais c’est aussi une danse pour flirter, non?  –Si tu le décides, oui. Ça peut-être aussi une danse pour s’amuser sans avoir forcement d’autres intentions derrière. – Je comprends. –Un, deux, trois, un, deux, trois, ne regardes pas les pieds, amuse-toi. On est passé à la chanson La negra tiene tumbao, j’ai ajoutée alors un tour basique à notre petit répertoire de pas de salsa : le fameux Ocho, –  Ça s’appel le Ocho, comme le huit, disais-je en présentant ce qui avait l’air d’être une acrobatie. Toujours en train de jouer à traduire l’intraduisible. La main droite à hauteur de la taille, ouverte vers le dos, pour commencer le tour ; quand la femme voit que l’homme mets sa main là, alors elle comprenne qu’elle doit mettre la sienne par dessous pour faire le Ocho, c’est implicite, mets ta main là.  – Oh là là!  –tu vois, ça s’appel le Ocho parce que tu fais deux tours comme la forme du numéro 8. –Encore une fois!  – Plies ton bras, pour que ça ne te fasse pas mal. –Comme ça?  – Exactement, maintenant on fait plus vite. – Génial!  – Maintenant quand on fini le Ocho, tu dois m’approcher avec les bras pour qu’on puisse continuer à danser et on fait le premier pas que je t’ai appris. Et on est passé à la chanson Que le den candela, j’étais en train de réussir, danser la salsa à nouveau!, mon pot avait l’air d’être intéressé, motivé et heureux, il n’y a pas une meilleure manière de commencer l’année qu’en dansant. –Tu sais qu’en France prendre la main de quelqu’un est quelque chose de très symbolique?  –Ah oui?  – Quand tu prends la main de quelqu’un c’est parce que soit vous êtes en couple soit tu fais la coquine et l’autre est intéressé.    – Je vois, même si c’est dans un contexte différent? – Dans ce contexte là, une fête, ça peut ne pas signifier ça si on sait à l’avance que tu es en train de m’apprendre à danser, mais si ce n’est pas clair alors la personne peut penser que tu es intéressé, le contexte est super important!  –Sachant que je ne t’ai même pas encore montré les autres pas  –Et quand tu mets ta main sur le hanche de quelqu’un ça veut dire que tu établis un contact physique avec cette personne, que  vous êtes plus proches et que les deux personnes acceptent. –En Colombie quand tu danses la salsa avec quelqu’un tu peux profiter pour faire le coquin aussi, mais même s’il y a beaucoup plus de contact physique que dans la culture française, cella ne veut pas dire la même chose, si pour danser il faut mettre ta jambe entre les jambes de l’autre ça ne veut pas toujours dire que tu vas lui proposer d’aller prendre un café le lendemain pour mieux la connaître.  – Ici ce n’est jamais la femme qui cherche l’homme pour lui proposer de danser, dans la plupart des cas c’est l’homme, si un jour tu fais la fête et que tu proposes à un garçon de danser avec toi peut-être que ton copain ne sera pas très content. –Je comprends… bon… on se connaît, allons danser!. « J’ai un cœur de rumba qui sent les rues de Cuba, le tabac, le café et le chango », cette femme est incroyable. Ce n’est pas que les européens ne savent pas danser, comment on dit dans la terre de la salsa, c’est que les codes sont différents, les personnes se touchent moins et le désordre passe d’abord par  les mots que par les gestes. Je n’ai pas pu danser plus de trois chansons dans cette soirée mais une fois encore cette culture m’a surpris, ce qu’au début était un cours exprès de salsa a fini en réflexion sur les différences du contact humain selon le pays dans lequel je suis. Ceux sont des miroirs qui se mettent face à moi et me renvoient l’image  de la personne qui suis-je : cuyabra, quindiana, colombienne, étrangère. Et c’est alors qu’on se construit, en collant des fragments, en partageant des traditions, en défaisant des coutumes, en mélangeant des accents, en inventant des mots, en changeant la dinde par le fois gras, en apprenant de tous, en écoutant sans porter un toast, en dansant sans danser.